CAHIER : La barrière langagière, un frein surmontable pour l’insertion socioprofessionnelle.

Image de Sani après ses courses dans un magasin de Paris

Considérée comme l’un des principaux freins à l’insertion socioprofessionnelle, la barrière langagière affecte de nombreux exilés arrivés en France. Certains méconnaissent les dispositifs mis en place pour l’apprentissage du Français. D’autres manquent de volonté pour l’apprentissage d’une nouvelle langue. Par conséquent, une multitude d’exilés peine à trouver un emploi. Cependant, bien que rencontrant des problèmes langagiers, de nombreux exilés n’ont jamais abandonné l’idée d’apprendre une nouvelle langue. C’est le cas de Sani, un exilé Bangladais qui nous partage son histoire.

Les causes du départ en exil de Sani.

Image des émeutes opposant les policiers et les civils

En 2019, l’on assiste à un déferlement de violences au Bangladesh. Celles-ci sont liées aux réclamations des associations syndicales qui veulent une augmentation des salaires. Avec l’avènement de ces événements qui avaient débuté timidement, Sani était loin d’imaginer que sa vie allait basculer.

Fils de parents paysans, Sani est l’aîné d’une famille de trois filles et de deux garçons. A 33 ans, bien que n’ayant pas eu la chance de poursuivre ses études au niveau secondaire, il est propriétaire et gérant d’un restaurant. Cette activité lui permet de subvenir aux besoins de sa famille. Les mouvements sociaux qui impactent durement la stabilité et la paix de la société bangladaise ne l’épargnent guère. Les affrontements quotidiens entre les forces de l’ordre et la population instaurent un climat d’insécurité. Ce contexte de violence grandissante lui fait perdre son restaurant. Il déclare d’ailleurs avoir été victime à plusieurs reprises, de violences lors des interventions des forces de l’ordre contre les manifestants. Face à ces difficultés, et à la misère que traverse sa famille, Sani décide de prendre la route de l’exil, en quête d’un meilleur avenir.

Les difficultés de l’exil : la barrière langagière.

Image de Sani durant son parcours d’exil

Si l’exil paraît souvent comme une solution, il n’a jamais été un chemin aisé. Celui de Sani sera un périple parsemé d’embûches. Du Bangladesh à la France, il traversera 11 pays, avec chacun ses propres réalités. Les différentes expériences auxquelles il fera face forgeront sa personnalité. Parmi ces différents pays, l’on citera : l’Inde, le Pakistan, l’Iran, la Turquie, la Grèce, la Macédoine, la Bosnie, la Slovénie et l’Italie.

Parlant des difficultés rencontrées lors de son exil, Sani nous livrera de nombreux récits dignes des films hollywoodiens. Ainsi, la non maîtrise de la barrière langagière dans les différents pays d’escale fera de lui une victime d’escroquerie en bande organisée. Sani perdra presque toutes ses économies suite à de nombreuses arnaques, juste parce qu’il ne comprend pas la langue. Toutefois, sa volonté de survivre et de prendre soin de sa famille ne le découragent pas. Sans s’apitoyer sur son sort, il relève la tête, et se fixe quotidiennement de nouveaux défis, en vue de l’atteinte de ses objectifs. Il nous confirme à cet effet que sa motivation était le fait de penser à la souffrance qu’endure sa famille.

Au-delà de la non maîtrise de la langue, Sani connaîtra de plusieurs autres difficultés.  Il nous fera part à cet effet de l’histoire inoubliable qu’il a vécu en Bosnie où il a passé 9 mois. En 2020, après deux jours de marche sans dormir, il sera arrêté par la police russe. Ainsi, à la suite d’une tentative pour traverser la frontière russe, Sani sera refoulé vers la Bosnie. A ce moment, confie t-il “j’ai eu la plus grande peur de ma vie”.

Quelques beaux souvenirs de l’exil.

Bien que parsemé d’embûches, le parcours d’exil de Sani sera également couvert de bonheur. Il fera de belles rencontres qui lui permettront de ne pas baisser les bras. A cette occasion, il évoque l’association International Organization for Migration dont il fit connaissance en Bosnie. Cette association lui donnait à manger, ainsi qu’un lit pour la nuit. Après une énième tentative, Sani va traverser la frontière russe pour se rendre en Slovénie, puis en Italie avant d’arriver en France en 2021. C’est le début d’une nouvelle vie pour Sani.

La France, une nouvelle terre d’accueil avec des difficultés surmontables.

Image de Sani lors de ses premiers jours en France

Avec l’expérience acquise tout au long de son parcours migratoire, Sani sait désormais que rien n’est facile dans un nouveau pays. En France, où il décide de s’établir définitivement, il cherche à s’adapter. Malgré toutes ses initiatives, Sani est freiné par sa méconnaissance du Français. C’est d’ailleurs l’une des causes pour lesquelles il accusera un retard dans le cadre de son processus de régularisation. Pour pallier cette difficulté, Sani décide de se rapprocher des membres de sa communauté. Cependant, ce choix s’avère inefficace. En effet, ces membres n’ont pas une bonne maîtrise du Français. L’on assiste donc à un phénomène de distorsion du message, ou de mauvaise traduction des messages. Sani s’expose ainsi à des informations souvent erronées. Toutefois, il parvient à se régulariser en 2022. Mais sa méconnaissance du Français ne lui permet toujours pas de trouver un emploi.

En 2023, sans baisser les bras, Sani fait la rencontre de Metishima. Dans le cadre de son accompagnement, il est orienté vers une association partenaire pour l’apprentissage du Français. Grâce à sa persévérance et à son engagement, il obtient le niveau de Français A2. Aujourd’hui, Sani comprend mieux le Français et parvient même à communiquer. Après avoir peaufiné son projet professionnel en collaboration avec son accompagnant, Sani intègre une formation débouchant sur un CDI. Grâce au programme de valorisation des compétences de Metishima, Sani travaille dans le domaine de la restauration qu’il affectionne. De plus, cet emploi lui permet d’améliorer son niveau de Français. Il se projette aujourd’hui dans le futur.

Porté vers l’avenir.

Parlant des projets futurs, Sani souhaiterait trouver un logement autonome qui le rendrait plus indépendant. Car, bien qu’ayant obtenu un emploi, Sani éprouve encore des difficultés à trouver un logement autonome. Par ailleurs, il nous avoue ressentir un vide causé par l’absence des membres de sa famille. A cet effet, il déclare vouloir les revoir un jour. Il n’exclut également pas la possibilité de les faire venir en France pour les éloigner des violences quotidiennes. 

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